Un autre regard sur la narcolepsie, épisode 3

Contenu publié le : 6 juin 2016 et modifié le: 27 mai 2016

Dans le cadre de leur TPE (Travaux Personnels Encadrés), trois lycéennes se sont penchées sur la narcolepsie, et ont présenté leur travail sous une forme originale : le carnet de bord d’un journaliste découvrant la narcolepsie de son neveu. Pas à pas, on suit les recherches et les découvertes du tonton reporter.  Vous pourrez ainsi suivre les huit épisodes, chaque semaine jusqu’aux vacances d’été !

Bravo à Clémence Faroult, Albane Bouchaud et Mathilda Jehan du lycée Saint Jean Hulst à Versailles pour la qualité de leur travail et bonne lecture aux internautes pour une meilleure connaissance de cette maladie rare !

Mais qu’est-ce que le système HLA ?

« Après de nombreuses analyses par techniques de biologie moléculaire, j’ai remarqué par un typage HLA II  la présence du gène HLA DR15 DQB1*0602  chez Jonathan. Moi-même, en tant qu’individu non atteint, je ne le possède pas. »

“HLA” est une abréviation pour “Human Leucocyte Antigen”, et est aussi connu  en français sous le nom de “CMH”, qui signifie “Complexe majeur d’histocompatibilité”.
Il est situé sur le bras court du chromosome 6, qui possède plus de 200 gènes. Quarante gènes codent pour les molécules HLA. Les gènes HLA sont séparés en deux classes, et chaque classe possède de nombreux allèles.
Ce système est un intermédiaire, il produit des molécules qui présentent des antigènes aux lymphocytes T (les globules blancs). Les lymphocytes T apprennent alors à reconnaître toutes ces substances étrangères à l’organisme devant être détruites.

hla1

hla2

Après avoir consulté de nombreux ouvrages, j’ai retenu une hypothèse qu’un scientifique avait émise : le gène HLA DR15 DQB1*0602 est-il à l’origine de la narcolepsie?

Cette hypothèse méritait, me semblait-il, d’être vérifiée.
J’ai donc effectué un test sur des Doberman, une race de chien qui, à ma connaissance, peut-être atteinte de cette maladie. Sur un échantillon de dix chiens malades, neuf d’entre eux avaient le marqueur équivalent de ce gène. J’en ai déduit que ce gène pouvait être un gène de prédisposition.
Parallèlement, d’autres ouvrages scientifiques le confirmaient pour l’homme: “ l’allèle DQB1*0602 est présent chez 97% des personnes narcoleptiques avec cataplexie, contre 20% chez des individus sains. 3 à 10% des narcoleptiques sont non porteurs de l’allèle”. Ainsi, ce gène n’est donc ni suffisant, ni nécessaire à l’apparition de la maladie, mais augmente toutefois les risques de développer la maladie au cours d’une vie. Aussi, il se transmet sur le mode autosomique récessif, c’est à dire qu’un être vivant doit hériter de chacun des allèles mutés de ses deux parents pour être porteur de la maladie. Dans le cas du doberman, le gène codant le récepteur 2 de l’hypocrétine a subi une mutation, ce récepteur est alors déficient et ne répond pas aux signaux d’éveil de l’hypocrétine, ce qui entraîne la maladie.

J’ai remarqué que chez Jonathan, les récepteurs à hypocrétine sont normaux, il n’y a pas de mutation du gène codant, son cas n’est donc pas le même que celui du Doberman. Je ne parviens pas à comprendre, que se passe-t-il réellement du côté de Jonathan ?

immunite

J’ai approfondi mes recherches, et j’ai enfin compris. Certes les récepteurs à hypocrétine de Jonathan sont normaux, mais il y a cependant des lésions dans l’hypotalamus postérieur, zone où les neurones produisent l’hypocrétine. Ces neurones sont détruits, et l’hypocrétine-1 est produite en trop petite quantité, c’est pourquoi Jonathan a des attaques subites de sommeil, comme pour le Doberman.  C’est en me rappelant la phrase “l’allèle DQB1*0602 est présent chez 97% des personnes narcoleptiques avec cataplexie” et en complétant mes recherches, que j’ai fait le lien avec le système HLA : j’ai compris que la narcolepsie pourrait être une maladie auto-immune. De ce fait, le système immunitaire de Jonathan est activé suite à la dégénérescence des neurones à hypocrétine et est conduit à s’attaquer à des cellules saines de l’organisme. Dans son cas, Jonathan porte une mutation du gène codant le système HLA. Celle-ci modifie alors les échanges entre les lymphocytes T et les corps étrangers présentés par son système HLA. Je me suis donc documenté, et j’ai appris qu’il existe pour certaines personnes narcoleptiques d’autres gènes de prédisposition, des gènes ni nécessaires ni suffisant à l’apparition de la maladie, mais qui, à son déclenchement, diminueraient la quantité de vie des lymphocytes T. De plus, d’autres narcoleptiques peuvent avoir une augmentation de la quantité en anticorps dirigés contre une protéine produite dans les neurones à hypocrétine. Ces auto-anticorps sont nommés anti-Trib 24.  Tout ceci conduit à un dérèglement du système immunitaire.

Le gène de prédisposition existant également chez les personnes saines, le processus auto-immunitaire est seulement déclenché par un facteur. Chez Jonathan, narcoleptique avec cataplexie, les lésions dans l’hypothalamus sont à l’origine du processus. Il existe cependant d’autres formes secondaires à l’origine de la narcolepsie, comme les maladies infectieuses, la sclérose en plaque, le syndrome parkinsonien, la myotonie de Steinert (une maladie musculaire transmissible) mais aussi les chocs émotionnels peuvent être des facteurs déclenchants (comme une dépression, un deuil ou encore même la naissance d’un enfant !).
La narcolepsie a même été déclenché chez certains enfants ou adolescents suite à une vaccination au Pandemrix contre le virus H1N1 lors de l’épidémie de grippe A en 2009. Certains suggèrent que l’ASO3, un adjuvant du vaccin, ou peut-être son effet stimulant, ou encore la grippe H1N1 elle-même, auraient déclenché l’apparition de la narcolepsie chez les personnes qui possèdent le gène de prédisposition HLA.

La maladie de Jonathan est donc très complexe, bien plus que je ne l’imaginais ! Cette maladie, qui atteint Jonathan isolément, est multifactorielle, impliquant des facteurs génétiques complexes ainsi que des facteurs environnementaux. Cette maladie est étroitement liée à HLA DQB1*0602, mais aussi à d’autres gènes de prédisposition, plus rares. La composante auto-immune de la narcolepsie est maintenant attestée.

Si je devais résumer, je retiendrais ceci :
Facteurs génétiques (gène de prédisposition) et/ou facteurs environnementaux (infection virale ou bactérienne, stress, maladie neurologique) → processus auto-immun → destruction des neurones à hypocrétine  → narcolepsie de type I

*Bibliographie

à suivre…