Contenu publié le : 14 octobre 2016
Le 11 octobre dernier, une vingtaine de membres du réseau ont participé à une soirée de formation très réussie, animée par les Docteurs Trogneux et Pételle, sur les alternatives à la prise en charge d’un syndrome d’apnées du sommeil par orthodontie associée à une rééducation linguo-buccale et par chirurgie d’avancée mandibulaire.
Il s’agit de techniques importantes mais peu connues des médecins du sommeil ; la salle était pleine d’auditeurs attentifs à la recherche d’informations pour améliorer la prise en charge de leurs patients.
Le Docteur Martine Trogneux, médecin stomatologue, a commencé par un topo passionnant basé sur des cas cliniques d’enfants chez lesquels, en l’absence d’hypertrophie amygdalienne, les malformations de la mâchoire et du maxillaire sont souvent la cause d’un syndrome d’apnées.
La prise en charge repose sur un diagnostic exact du trouble, basé sur les mesures précises par téléradiographie et céphalométrie du positionnement de la mâchoire et du maxillaire, de leur taille et de leur potentiel de croissance. La correction d’une insuffisance transversale du palais fait appel à un traitement par disjonction, utilisant un dispositif fixé sur les dents de l’arcade supérieure qui, avec l’intervention des parents tous les jours pour écarter le vérin (ils donnent simplement un tour de clé !), permet de gagner parfois plus que 10 mm de largeur. Cette ouverture n’est pas douloureuse, élargie l’arcade et donc les fosses nasales, permettant à l’enfant qui respire par la bouche de retrouver une respiration nasale. Par la suite la pression de la langue sur la voûte du palais continue l’expansion de celui-ci. Le Dr Trogneux a souligné l’importance par la suite d’une rééducation fonctionnelle qui a pour but d’apprendre à l’enfant à respirer par le nez. Dans l’évolution, les dents se redressent et se repositionnent avec des résultats esthétiques très positifs.
Il est clair que plus la prise en charge est faite jeune, plus les modifications osseuses sont faciles à réaliser. Les rétrognathies et les rétromaxillies repondent elles aussi à un appareillage. La normalisation de l’anatomie s’associe à une amélioration des apnées objectivée par les enregistrements de sommeil. Pour le moment nous ne disposons pas d’étude de cohorte chez les enfants qui permettent de connaître les résultats à long terme.
Les modifications de la boite osseuse sont également possibles chez les adultes, mais nécessitent des interventions chirurgicales. Le Docteur Boris Pételle, ORL, nous a parlé des ostéotomies bimaxillaires.
L’orientation des patients vers un centre chirurgical est parfois difficile ; le patient doit être motivé pour une prise en charge qui risque d’être longue, surtout s’il faut corriger des troubles d’occlusion en amont par orthodontie, avec des suites post-chirurgicales qui nécessitent un mois d’arrêt de travail. En plus, il doit faire face à des modifications de son visage, pas toujours simples à appréhender. L’indication de la chirurgie n’est pas limitée aux patients rétrognathes, mais une obésité (IMC>30kg/m²), un patient âgé de plus de 65 ans (les résultats sont meilleurs chez le sujet jeune) et la présence de comorbidités sont des contre-indications. Chez certains, la mâchoire supérieure est tellement serrée qu’il faut au préalable réaliser une disjonction (comme chez les enfants) ; mais comme la suture est fermée, il faut intervenir chirurgicalement en sectionnant le maxillaire avant la pose des distracteurs.
Dans un second temps, les ostéotomies permettent d’avancer la mandibule et le maxillaire, tirant en avant la langue et dégageant le pharynx avec un gain de 57% de volume selon les études faites par imagerie en 3D. Le traitement est une réussite pour 85% des patients, et les modifications du visage, illustrées par les photos des cas cliniques du Dr Pételle, sont esthétiquement très réussies. Avant le traitement une simulation des modifications du visage est possible permettant au patient de mieux anticiper son futur visage.
Un traitement au préalable par orthèse d’avancement mandibulaire permet également d’évaluer le retentissement d’un avancement de la mâchoire sur l’IAH, mais les résultats d’une avancée bimaxilliare sont toujours supérieurs aux résultats obtenus avec l’orthèse, car l’avancée réalisée est plus importante. Les études ont démontré que le bénéfice de l’avancée est toujours présent à 5 ans.
Nous avons tous retenus que, pour les enfants, une évaluation précoce, chez un stomatologue ou un orthodontiste qui fait de l’orthodontie fonctionnelle, est essentielle car il est clair que la correction des anomalies est plus facile chez l’enfant. Pour les adultes motivés et qui ne tolèrent pas la PPC ou l’OAM, la chirurgie bimaxillaire permet une amélioration importante et permanente du SAS avec des résultats qui sont meilleurs chez les jeunes.
Nous remercions sincèrement nos orateurs pour leurs interventions particulièrement enrichissantes ! Nous les avons également sollicités pour écrire un article en français qui résume leurs travaux et pour réaliser un annuaire des praticiens spécialisés dans ces types de prise en charge afin d’orienter au mieux nos patients.
Dr Sarah HARTLEY
Médecin coordonnateur du Réseau Morphée