Contenu publié le : 1 février 2022 et modifié le: 25 septembre 2023
Dans le cadre de la Journée du Sommeil 2022, le Réseau Morphée organise en partenariat avec la Cité de la Santé une conférence sur le rêve qui abordera différentes dimensions de cette expérience unique, très spécifiquement humaine qui a fasciné des sociétés au cours de l’histoire, interrogé des artistes, des chercheurs, des théologiens, des prophètes et conduit l’esprit humain à la limite de la folie ou de l’hyper-lucidité.
Vous pouvez consulter tous les replays de cette conférence sur notre chaîne YouTube :
Comment a évolué notre compréhension du rêve depuis son rôle dans les sociétés antiques, quand de grandes décisions étaient guidées par les prêtresses au travers de leurs rêves divinatoires ? Les rêves sont-ils l’expression de désirs inconscients, comme le soutenait Freud, ou de formidables machines à rejouer, anticiper, consolider des expériences du vécu et de l’apprentissage de l’individu ? L’activité du cerveau ne s’arrête pas au cours du sommeil. Ce temps de pause du dormeur est un temps de nettoyage, de trie des informations accumulées, de rangement des souvenirs, de reconstruction des réserves énergétiques, de réparation des cellules. Le temps du sommeil, où le dormeur s’extrait du monde, est l’équivalent d’un super back-office qui fait un travail fondamental et invisible de construction et de réparation. Le récit du rêve est un accès différé à cet espace-temps si fondamental à l’individu. Il est aussi à la frontière de la réalité, des hallucinations, des rêveries, et de l’imagerie mentale.
L’image mentale possède un statut multiple qui se réfère aussi bien au rêve nocturne, à la rêverie diurne, qu’à l’hallucination visuelle. Le ressenti subjectif de ces différentes expériences n’est pourtant pas le même, tout comme un rêve diffère d’un cauchemar. Qu’est-ce qui distingue donc ? En expliquant l’origine du processus cérébral qui consiste à visionner des images intérieures, nous verrons que ces images s’articulent au carrefour de la mémoire, de l’affect et de la perception. Des illustrations seront tirées de l’Hartung Study, l’expérience d’Abraham Poincheval immobile 7 jours et 7 nuits devant une œuvre de Hans Hartung.
L’histoire du rêve et des rêveurs, dans l’acception large de la notion – l’activité nocturne, la qualité visionnaire, l’espérance… – est une histoire connue et souvent convoquée, certainement parce que le rêve et les rêveurs eux-mêmes, font rêver. Mais, précisément, qu’en est-il de l’histoire de cette seconde notion : non pas rêver, mais faire rêver ? D’où vient que cette formule est désormais devenue magique à tel point que le lieu commun « cela fait rêver » compte parmi les plus usités pour évoquer le désir et la projection vers l’avenir ? Cela vient des arts et des artistes, et notamment du milieu du XIXe siècle : les milieux Saint-simoniens, fouriéristes, puis symbolistes ont joué en la matière un rôle méconnu et déterminant.
Au travers des récits d’intervenants aussi différents qu’un médecin du sommeil, un psychanalyste-neuroscientifique, un historien de l’art et un artiste, ces différentes facettes du rêve seront abordées.
Les intervenants :
Dr. Sarah Hartley
Sarah Hartley est spécialiste du sommeil, médecin coordonnateur du Réseau Morphée, praticien-hospitalier à l’hôpital Poincaré de Garches et responsable pour l’accréditation des services du sommeil au sein des sociétés savantes de la médecine du sommeil française (SFRMS) et européenne (ESRS).
Yves Sarfati est psychiatre, psychanalyste, docteur en neurosciences. Ancien professeur des universités – praticien hospitalier, il est enseignant l’Association Psychanalyse et Psychothérapie créée par Daniel Widlöcher et coordonne le séminaire de spécialisation des internes en psychiatrie « Formation à la pratique de la psychiatrie psychodynamique – Son articulation théorique aux neurosciences » à l’hôpital Sainte-Anne. Dernière publication : Pour une éthique du décloisonnement entre psychiatrie, psychanalyse et neurosciences (Doin, 2020).
Thomas Schlesser est directeur de la Fondation Hartung-Bergman à Antibes et professeur d’histoire de l’art à l’Ecole polytechnique. Il a notamment publié des ouvrages sur Gustave Courbet, Paul Chenavard ainsi que sur la censure. Il est également l’auteur de L’Univers sans l’homme (Hazan, 2016) dont il s’apprête à tirer une exposition au Musée des Beaux-Arts de Valence et de Faire rêver (Gallimard, 2019). Il publiera chez Gallimard une biographie d’Anna-Eva Bergman.
M. Abraham Poincheval
Abraham Poincheval, né en 1972, est aujourd’hui considéré comme l’un des principaux artistes de la scène de la « performance » en France, et s’est notamment rendu célèbre avec des œuvres qui mettaient à l’épreuve ses limites psychiques et corporelles sur un temps très long, jusqu’à une semaine, dans des endroits exigus (par exemple Pierre au Palais de Tokyo en 2017). Son admiration pour l’œuvre de Hans Hartung s’articule aux hallucinations provoquées par plusieurs de ses expériences d’isolement. La Fondation Hartung-Bergman a invité Abraham Poincheval à s’immobiliser dans un caisson spécial dans lequel il a eu sous les yeux, en continu, 7 jours et 7 nuit durant, une seule et même œuvre de Hans Hartung comme support hallucinatoire. L’artiste ne la découvrant qu’au moment d’entrer dans la structure…